Cuchulain’s Fight With the Sea – Yeats – traduction et analyse
« Cuchullin […] était le grand guerrier du cycle de la Branche rouge. Mon poème s’appuie sur une légende d’Irlande de l’ouest restituée par Curtin dans Mythes et Folkore d’Irlande. Le récit bardique de la mort de Cuchulain est très différent » [1].
Parmi les poèmes qu’il consacre au héros irlandais, on peut distinguer en particulier Cuchulain’s Fight With the Sea, version de 1925 d’un texte écrit en 1892 qui s’intitulait plus sombrement The Death of Cuchulain (La mort de Cuchulain), et s’achevait par la mort du personnage. The Death of Cuchulain sera également le nom d’une pièce de théâtre de Yeats, datée de 1939 (l’auteur meurt la même année) et conçue pour l’Abbey Theatre.
Turner, Waves Breaking against the Wind, 1840 (détail), musée Tate. |
Cú Chulainn dans l’adaptation en anime de la franchise Fate/stay night. |
Le poème noue inévitablement un nœud tragique autour des personnages, Cuchulain et son fils étant contraints par leurs propres serments de s’affronter jusqu’à ce que la mort les départage. Cependant, le thème œdipien du fils devant faire ses preuves en tuant le père aboutit cette fois à la mort du fils. La confusion des noms ajoute encore ici une dimension dramatique : au moment de mourir, le fils s’efforce de donner son nom : « Cuchulain I, mighty Cuchulain’s son », semblant moins interpeller le héros irlandais que s’approprier morbidement l’identité de celui-ci, ouvrant le champ des interprétations. Cuchulain s’est-il vaincu lui-même ? a-t-il détruit la meilleure part de lui ? sa jeunesse ? ses illusions ? S’agit-il essentiellement d’une crise morale ?
Le poème traduit :
qu’à celui dont la lame t’y contraint ; attends qu’ils aient trouvé
quelque ripailleur par même serment lié. »
que j’aimai autrefois. »
et la vieille lame fracassant la garde de la nouvelle lame
transperça l’homme.
— J’abrège tes souffrances. Je ne peux rien de plus. »
Comme le jour endurait jusqu’au soir son joug,
Cuchulain demeura tête ployée sur les genoux ;
Lors Conchubar, des hommes le plus subtil,
disposa autour de lui ses druides, dix par dix,
et leur déclara : « Cuchulain transi restera là
trois jours encore dans une quiétude terrible,
puis il se dressera, en proie au délire, et nous massacrera.
Incantez à son oreille de magiques chimères
afin qu’il combatte les cavales de la mer. »
Les druides s’affairèrent à leurs voies impénétrables
et incantèrent trois jours durant.
Cuchulain s’ébroua,
contempla les cavales de la mer, écouta
les chars de bataille, son propre nom clamé,
et se lança contre le flot invulnérable.
Illustration de Stephen Reid pour Cuchulain, the hound of Ulster, récit d’Eleanor Hull, 1911. |
‘I have long waited, mother, for that word:
‘Whether under its daylight or its stars
My father stands amid his battle-cars.’
‘Yet somewhere under starlight or the sun
My father stands.’
‘I only ask what way my journey lies,
For He who made you bitter made you wise.’
‘The Red Branch camp in a great company
Between wood’s rim and the horses of the sea.
Go there, and light a camp-fire at wood’s rim;
But tell your name and lineage to him
Whose blade compels, and wait till they have found
Some feasting man that the same oath has bound.’
And his young sweetheart close beside him knelt,
Stared on the mournful wonder of his eyes,
Even as Spring upon the ancient skies,
And pondered on the glory of his days;
And all around the harp-string told his praise,
And Conchubar, the Red Branch king of kings,
With his own fingers touched the brazen strings.
I have often heard him singing to and fro,
I have often heard the sweet sound of his bow.
Seek out what man he is.’
At the sword-point, and waits till we have found
Some feasting man that the same oath has bound.’
Cuchulain cried, ‘I am the only man
Of all this host so bound from childhood on.’
After short fighting in the leafy shade,
He spake to the young man, ‘Is there no maid
Who loves you, no white arms to wrap you round,
Or do you long for the dim sleepy ground,
That you have come and dared me to my face?’
‘The dooms of men are in God’s hidden place,’
‘Your head a while seemed like a woman’s head
That I loved once.’
‘Cuchulain I, mighty Cuchulain’s son.’
Then Conchubar, the subtlest of all men,
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